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Un article au sujet de deux constables dans le journal 24h

 

Le journaliste Gabriel Ouimet du journal 24h publiait récemment le récit de deux constables spéciaux de la Sûreté des réseaux dont l’acte de bravoure a été reconnu lors de l’événement des Actes méritoires de la STM.

Le reportage retrace le fil des événements en plus de donner la parole à nos deux collègues à propos de ces quelques heures troublantes dont ils se souviendront certainement toute leur vie.

Voici la retranscription de l’article en question, tirée du site web 24h.ca (source).

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Chasse à l’homme dans le métro: 2 héros de l’ombre de la STM racontent leur appel le plus marquant

Gabriel Ouimet, journal 24h
28 septembre 2023

«Si vous voulez que je descende, venez me chercher!» Ces mots, lancés il y a deux ans par un homme en détresse perché à dix mètres du sol dans les entrailles du métro, hantent encore Sylvain Fontaine et Yan Dubois, deux employés que la Société de transport de Montréal (STM) a récemment honorés pour leur courage.

Les deux constables spéciaux de l’équipe Sûreté des réseaux de la STM ont l’habitude d’intervenir lors d’agressions et de tentatives de suicide. Cette soirée de novembre 2021 reste cependant gravée dans leur mémoire.

Un homme dans la jeune trentaine vient d’être aperçu dans le tunnel entre les stations Joliette et Préfontaine, où le constable Sylvain Fontaine et un collègue sont dépêchés.

L’heure est grave: un courant de 750 voltes nourrit les rails du métro. Une mauvaise chute peut s’avérer mortelle. Malgré les avertissements, l’homme en crise poursuit son chemin et les agents le perdent de vue dans la pénombre du tunnel de la ligne verte, sous Hochelaga-Maisonneuve.

«On avait peur pour notre sécurité, parce qu’on voyait très mal. On ne savait pas où il était exactement et on ne savait pas s’il était armé. Est-ce qu’il nous en veut? Est-ce que c’est une tactique pour nous sauter dans le dos et nous attaquer? Ce sont des questions qu’on se posait», raconte l’agent Fontaine, qui croyait avoir perdu sa trace.

De petits bruits trahissent toutefois la présence du pourchassé dans un poste de ventilation.

«On s’est levé la tête et on a vu qu’il y avait une trappe d’aération beaucoup plus haut. La personne était tout à fait en haut, en silence», poursuit le constable, qui avait été rejoint par son collègue, le sergent Yan Dubois.

Piégé à 10 mètres du sol

Six paliers, reliés entre eux par des échelles soudées au mur, séparent les employés de la STM de l’intrus, qui se trouve presque dix mètres plus haut. Ce dernier est pris au piège: la trappe qui mène à l’extérieur est soudée, pour éviter les intrusions dans le métro. La seule issue possible se trouve au sol, mais il refuse de descendre.

«Si vous voulez que je descende, venez me chercher!», hurle l’homme en direction des constables. Le désespéré a du mal à se tenir sur la barrière de sécurité sur laquelle il est monté. Il pourrait tomber à tout moment. Il menace de sauter.

Yan Dubois comprend alors que le temps presse. Il décide de grimper.

«Plus je montais, plus il devenait agressif et plus c’était dangereux. Arrivé au palier juste en dessous de lui, j’ai arrêté. Je ne pouvais pas le rejoindre, parce que j’arrivais tête première sur son palier. Il aurait pu me donner un coup de pied dans le crâne», relate M. Dubois.

De sa nouvelle position, le sergent espère gagner la confiance de l’homme en discutant avec lui. Pendant ce temps, cinq étages plus bas, Sylvain Fontaine s’imagine le pire.

«Je me disais qu’il pouvait à tous moments tomber juste devant moi. Ça me faisait vraiment froid dans le dos, parce qu’il se serait écrasé à 4 pieds de moi. Je craignais que ces images me traumatisent et me hantent pour le reste de ma vie.»

Sauvé par des cigarettes

Pendant les trois heures suivantes, M. Dubois assume un rôle de négociateur. Le suicidaire lui confie qu’il vient de se faire laisser par sa conjointe et qu’il est intoxiqué. Il monte et descend de la barrière de sécurité à répétitions et va jusqu’à uriner sur les agents.

Le trentenaire exige ensuite de parler à son ex-conjointe. Yan Dubois, trempé, joue la comédie et feint d’être au téléphone avec elle. Il improvise des réponses aux messages décousus de l’homme.

C’est finalement un paquet de cigarettes qui permet de mettre fin à l’opération et de sauver la vie du malheureux, indique Sylvain Fontaine, que des agents du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) avaient rejoint.

«Il a accepté de descendre pour venir chercher une cigarette. Aussitôt qu’il a été à ma hauteur, j’ai bondi sur lui avec un policier et on l’a immobilisé», raconte le gaillard de 250 livres.

Le courage de Yan Dubois et Sylvain Fontaine a été célébré en juin 2023. Ils ont chacun reçu un certificat de bravoure lors d’un gala soulignant les actes méritoires des employés de la STM. Un honneur qu’ils accueillent avec l’humilité caractéristique des héros de l’ombre.

«On a fait que notre travail», lance Yan Dubois.

Deux fois plus de détresse en 5 ans

Depuis plus de 17 ans, le quotidien de Yan Dubois et de Sylvain Fontaine est rempli d’appels à l’aide qui témoignent de la détresse grandissante dans le métro.

En cinq ans, le nombre d’interventions et d’appels sollicitant les constables spéciaux de la STM a plus que doublé, passant de 20 310 en 2018 à 42 008 en 2022.

«Des suicides, il y en a. Le réseau est grand», souffle Sylvain Fontaine.

Et parfois, un simple appel de routine peut s’avérer traumatisant, poursuit-il.

«Un jour, à la station Henri-Bourrassa, j’ai reçu un appel pour une personne en situation d’itinérance qui dormait au sol. Mais quand je suis arrivé pour la réveiller, elle était morte. J’ai essayé de la réanimer avec un massage cardiaque. Pour moi, ça a été traumatisant. Je suis parti en arrêt de travail pendant trois mois. J’ai encore des flashs aujourd’hui», confie le constable.

Les agents Dubois et Fontaine le martèlent: 75% de leur travail consiste à porter secours à des usagers, qu’il s’agisse d’une personne qui se fracture une jambe sur un quai ou d’un aîné qui déboule des escaliers roulants. Et parfois, comme cette soirée de novembre 2021, leur travail peut sauver des vies.

«On aimerait rappeler aux gens qu’on est là pour les aider. Les interventions dissuasives, comme contrôler les billets ou autres, c’est seulement 25% de notre métier. Le reste du temps, on aide les gens», concluent-ils.

Si vous-même ou un de vos proches êtes en détresse:
· Appelez le 1 866 APPELLE (277-3553)
· Textez le 535353
· Clavardez sur suicide.ca

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